Dans le récit d’aujourd’hui, c’est Jésus qui est à l’initiative. C’est lui qui aperçoit cet homme portant un lourd handicap, dans l’obscurité depuis sa naissance, mendiant pour sa subsistance, une situation à laquelle Jésus ne peut rester insensible.
L’homme de son côté n’a rien demandé. Peut-être n’a-t-il plus la force d’espérer.
Et puis, il y a les disciples qui semblent aussi troublés par la situation de cet homme. Et sans doute est-ce pour contrôler ce trouble qu’ils viennent vers Jésus avec une question: Qui a péché pour que cet homme soit aveugle ? Une question qui peut nous paraître étrange aujourd’hui. Elle reflète la manière dont on abordait la souffrance à cette époque, mais elle reflète aussi cette tentation qui, sous diverses formes, traverse l’humanité, tentation de trouver une explication, une responsabilité, une justification à l’obscure réalité du mal et de la souffrance qui nous inquiète tous.
Jésus, lui, résiste à cette tentation. Il n’est pas venu pour expliquer le mal et la souffrance. Il est venu pour porter notre souffrance et pour nous délivrer du mal.
Avec sa salive et la poussière de la terre, Jésus façonne un baume. Serait-ce un écho au récit de la Genèse où le Dieu créateur façonne l’homme avec la poussière du sol?
J’imagine Jésus appliquant ce baume en touchant délicatement les yeux de l’homme dont il ne peut pas encore croiser le regard. Puis il l‘envoie se laver à Siloé et au retour l’homme voit enfin la lumière, il voit enfin de ses propres yeux ce monde qu’il n’avait jamais vu.
Quelle délivrance extraordinaire !
Toutefois c’est une délivrance temporaire puisqu’un jour notre homme a rendu son dernier souffle et ses yeux se sont refermés.
Mais dans cet acte que pose Jésus, il y a plus que la délivrance du handicap.
Au-delà de la compassion de l’homme Jésus pour cet homme aveugle, il y a la grande compassion de Dieu pour ce monde parfois si obscur. Au-delà de la lumière qui pénètre enfin dans les yeux de cet homme, il y a l’annonce d’une lumière qui fait irruption dans l’obscurité du monde en s’incarnant dans l’homme Jésus, et puis la promesse qu’un jour cette lumière se répandra jusque dans les coins les plus obscurs pour en chasser définitivement le mal et la souffrance. C’est alors que nos yeux s’ouvriront enfin sur un monde complètement renouvelé et délivré.
Daniel